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Description

Dans cette vidéo, Jérôme Ballet discute des origines de la RSE, de la fin du 19ème siècle à aujourd'hui. Il montre bien qu'en fonction des époques, la RSE a pris des formes différentes et tente d'expliquer et d'illustrer cela.

Objectif d'apprentissage :
- Identifier les grandes étapes historiques de la Responsabilité sociale des entreprises, du 19ème siècle à aujourd’hui.

État
  • Labellisé
Langues
  • Français
Mentions Licence
  • Gestion
Niveau
  • Bac+2
  • Bac+3
Thèmes
  • RSE & Management
Types
  • Grain audiovisuel
Analyse conceptuelle de la RSE
Analyse conceptuelle de la RSE
La RSE : Approches institutionnalistes vs approches contractualistes
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Formes de régulation et d'intervention en matière de RSE
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Les stratégies de RSE
Les stratégies de RSE
Multinationales et conditions de travail
Multinationales et conditions de travail
Limites du cadre posé par la RSE
Limites du cadre posé par la RSE
Contributeurs

Ballet Jérôme

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Jérôme BALLET, Maître de conférences – Université de Bordeaux 

Qu’est-ce que la RSE, la responsabilité sociale ou sociétale d’une entreprise ?

De manière résumée, c'est le fait pour une entreprise de répondre aux attentes de la société.

Cette responsabilité, ces formes de responsabilités - puisqu'il y en a plusieurs-, ont démarré il y a fort longtemps. 

Un cas tout à fait remarquable d'émergence de la responsabilité, c'est le paternalisme au XIXe siècle.

Le paternalisme, il a consisté pour des patrons à fournir à leurs ouvrières et à leurs ouvriers un ensemble de protections, de prestations sociales qui allaient, comme on l'a souvent dit, du berceau à la tombe.

On a un très bel exemple en France avec le cas Michelin qui a fourni à ses ouvrières et à ses ouvriers des logements avec eau courante, électricité, qui a scolarisé les enfants, qui a créé des internats, qui a mis en place une maternité, un sanatorium, des associations sportives etc...

Évidemment, tous ces bénéfices qui sont offerts par le patron, en absence d'intervention de l'État, aux salariés et aux employés a un certain nombre de fonctions.

-    Sa première fonction c'est de stabiliser la main-d’œuvre.

 Si les ouvrières ou les ouvriers partent ailleurs, ils n'auront pas forcément les mêmes choses.

-    Sa deuxième fonction, c'est de contrôler le comportement.

Si un ouvrier est pris à boire plus que de manière modérée, on peut lui supprimer le bénéfice de ces prestations. 

Si une ouvrière tombe enceinte sans être mariée, on peut lui supprimer le bénéfice de ces prestations.

Donc il y a un contrôle réel du comportement des employés dans l'entreprise et pour certains patrons, c'est même un mode d'éducation.

-    Il y a une troisième fonction là aussi tout à fait remarquable dans le contexte du XIXe siècle jusqu'au début du XXe, c’est que les patrons sont aussi des élus locaux, donc on contrôle le vote.

Cette première forme de responsabilité, évidemment elle va disparaître, elle va s'effacer avec l'émergence de l'État-providence après la Seconde guerre mondiale.

Il faudra donc attendre un laps de temps assez long, une trentaine d'années, pour voir resurgir la question de la responsabilité de l'entreprise d'une manière nouvelle, avec dans les années 70 les premières critiques de l'État-providence qui coûte trop cher, qui est inefficace etc.

 Avec les premières catastrophes environnementales, celle du Torrey Canyon en 1967, celle de l'usine Seveso en 1976, celle de l’Amoco Cadiz en 1978.

Toutes ces catastrophes écologiques soulèvent une question tout à fait remarquable pour les populations, c’est qu’est-ce que font les entreprises pour laisser des situations pareilles, laisser leurs équipements se dégrader et polluer l'environnement ?

Mais au-delà de ces questions environnementales, il y a un certain nombre de scandales qui vont être reliés à la culture de certaines entreprises et qui vont marquer de manière tout à fait nouvelle la question de la responsabilité de l'entreprise.

Il y a deux scandales tout à fait emblématiques :

•    Le premier c'est le scandale Goodrich en 1968. 

Il concerne en fait des fraudes dans le laboratoire qui teste les systèmes de freinage qui vont équiper l’Air Force américaine.

Or évidemment, s'il y a fraude sur le contrôle de système de freinage, ça signifie que la vie des pilotes est en jeu. 

Mais ce qui est en cause, ce n'est pas la responsabilité du dirigeant, du laboratoire, c'est le fait que la culture d'entreprise dans ce laboratoire permet le laxisme et que les contrôles sur la qualité des systèmes de freinage est plus ou moins fait avec rigueur.

•    Le deuxième scandale, c'est la catastrophe d’Ermenonville en 1974. 

Un avion décolle de Paris et quelques minutes après il s’écrase dans la forêt d’Ermenonville tuant tous les passagers à bord. 

 Là, la responsabilité, celle qui est pointée, c'est celle de l'entreprise qui fabrique l'avion, le DC-10, l'entreprise américaine MacDonnell-Douglas. 

Qu'est-ce on lui reproche ? On lui reproche une chose toute banale, c'est de ne pas avoir mené avec rigueur les tests de fiabilité du système de fermeture des portes. 

 Et là encore, ce n'est pas le patron qui est mis en cause, c'est le fait que dans l'entreprise, et bien, on peut mener des tests de manière non rigoureuse, que les employés finalement ne seront pas sanctionnés s'ils ne font pas leur travail jusqu'au bout, et ça conduit à un risque énorme pour les compagnies d'aviation : le fait que leurs passagers peuvent mourir dans un avion qui va s'écraser.

Ce que soulèvent ces deux cas et qui est tout à fait nouveau, c'est que ce n'est pas le patron qui est pointé du doigt, c'est la culture de l'entreprise, c'est l'organisation.

Avec les années 90 on a une nouvelle forme de responsabilité ou de mise en évidence de la responsabilité qui apparaît où les entreprises sont à nouveau mises sur la sellette mais pas en tant qu’organisations, en tant que personnes.

Elles sont personnifiées.

Cette personnification, elle est liée à la globalisation. Le fait que les entreprises sont mondiales et que partout dans le monde on va retrouver les mêmes entreprises avec leurs actions.

Pour critiquer à nouveau les systèmes défaillants dans l'entreprise, on ne fait plus appel à l'organisation défaillante dans l'entreprise, on dit c’est l’entreprise, c’est un tel, c’est telle entreprise ou telle entreprise qui est défaillante, vu sa taille mondiale, elle devrait assumer plus de responsabilités.

Et les patrons vont utiliser - notamment un certain nombre de mouvements patronaux vont utiliser -, une réflexion sur la notion d'entreprise citoyenne dans un monde globalisé où il n'y a plus d'État pour les entreprises, on leur demande de réappartenir à un État ou d'adopter un comportement citoyen vis-à-vis des populations mondiales.

Au final, à quoi ça nous conduit toute cette diversité d'origines ? Ça nous conduit à une réflexion sur la responsabilité de l'entreprise qui est multiple.

Est-ce que c'est la responsabilité du dirigeant comme c'était le cas pour le paternalisme XIXe ou au début du XXe ? 

Est-ce que c'est la responsabilité d'une organisation, d'un système, d'une culture ? Mais pas spécifiquement d'une entreprise mais du système managérial de l'entreprise ? 

Ou est-ce que c'est la responsabilité d'une entreprise personnifiée dans un monde globalisé ?

Au bout du compte, quand on s'interroge sur cette diversité de formes de responsabilités, qu'est-ce qu'on attend ? On attend que l'entreprise se comporte d'une manière un minimum responsable vis-à-vis de ce qu'attendent les populations.